Comme
d'autres films de Pixar, Wall-E
procède à une anthropomorphisation d'une construction mécanique: après les
jouets (les Toy Story) et les
voitures (Cars), c'est au tour d'un
robot de prendre vie et d'attirer toute la sympathie du spectateur.
C'est
pari tenu avec Wall-E, petite machine que les humains ont laissé sur terre avec
la mission de nettoyer la planète. Maladroit, solitaire et curieux, le robot se
voit doté d'une personnalité et d'une sensibilité particulièrement humaines.
L'humanisation se poursuit lorsque le personnage tombe amoureux d'une
"robote", envoyée sur terre pour vérifier si la vie humaine est de
nouveau possible. L'humanisation progressive du personnage peut être vue comme
la manifestation quasi déontologique de la démarche de Pixar qui consiste à
donner vie à des personnages fictifs, crées en images de synthèse. L'une des
scènes récurrentes du cinéma Pixar demeure en effet la scène de la
"casse" où l'on s'inquiète de la possible disparition des
protagonistes, pour qui la vie est fragile.
Wall-E est construit en deux parties. La première, muette et
quasi expérimentale, est une fable écolo où l'on voit Wall-E essayer
péniblement de purifier la planète détruite par les hommes. Les images post
apocalyptiques d'un New York enseveli d'ordures, avec ses buildings en
décomposition, renvoient aux images du 11 septembre. Mais la ville, déserte et
abandonnée, fait également penser aux films de Science-fiction futuristes comme
Le Monde, la Chair et le Diable
(1959) de Ranald MacDougall ou encore les différentes adaptations de Je suis une Légende de Richard Matheson.
Mais la peur de l'atomique a été remplacée par celle de la pollution: la
planète n'est plus qu'une terre aride et sale, un désert d'immondices. Nous
noterons également l'influence de Spielberg, l'allure de Wall-E ainsi que ses
virées nocturnes, renvoyant à ET ou Rencontre du Troisième Type.
Dans
la seconde partie, Wall-E part dans l'espace pour rejoindre un vaisseau spatial
où se sont entassés les humains. Les hommes se reposent sur les machines, qui
les portent et qui travaillent à leur place. A travers la vision de ces hommes
du futur, idiots, obèses et indifférenciés, les auteurs de Wall-E se prêtent à une satire des Américains. Car cette partie de Wall-E s'apparente à une anticipation
dystopique, genre critique de la SF: règne de la machine, aseptisation de la
société, victoire du consumérisme et de la publicité... Les humains ont renoncé
à leur identité et sont devenus asservis par la machine. L'idée s'illustre
explicitement avec le capitaine du vaisseau, victime de l'autorité de son
ordinateur, le "pilote automatique". On peut y voir une référence à
2001, l'Odyssée de l'Espace et HAC, l'ordinateur qui prend le contrôle.
En
montrant la victoire dangereuse de la machine sur l'homme, la seconde partie de
Wall-E semble donc contredire son
propos initial qui consistait à humaniser la machine avec son personnage
principal. Le film aboutit à une conclusion relativiste et manichéenne: comme
chez les hommes, il y a des bons et des mauvais chez les machines. Nous
noterons d'ailleurs la victoire de l'ancien sur le nouveau, celle de la bonne
vieille machine obsolète sur le high tech, dans une logique conservatrice et
réactionnaire. Si l'on ajoute à cette vision simpliste, des courses poursuites
et de l'action un peu fatigantes, on comprendra donc que cette seconde partie
de Wall-E est bien moins convaincante
que la première.
Inégal
mais original, Wall-E demeure tout de
même une réussite des studios Pixar dont apprécie la beauté de l'animation et
la délicatesse de la poésie.
08.01.13.