Avant le triomphe des Intouchables (presque vingt millions de
spectateurs en 2011), le duo de réalisateurs Eric Toledano et Olivier Nakache
avait déjà connu un certain succès avec Tellement
proches (781 715 entrées).
Un film sur la famille pour la famille. Tellement proches semble avant tout assez caractéristique d'une
certaine tendance du cinéma français contemporain, la comédie française autour
de la famille. En effet, le film est centré sur les relations familiales entre
les couples de trois sœurs. Alain, ancien moniteur du Club Med, méprise la
belle famille de son épouse Nathalie:
Catherine, la mère obsédée par la réussite de son enfant en bas âge et
son mari Jean-Pierre, un pathétique avocat commis d'office; Roxanne, une hystérique
qui a jeté son dévolu sur un jeune médecin noir. Pour Alain, cette belle
famille, composée d'individus aux caractères différents, est envahissante.
A travers le regard d'Alain,
les réalisateurs nous proposent donc dans un premier temps la vision d'une
famille tiraillée et en décomposition. Le titre du film souligne ironiquement
ce constat. Cependant, malgré les guerres internes et les dissensions, la
famille va se souder au fil du temps et des épreuves: les liens de parenté vont
se doubler d'un sentiment de solidarité. La critique des maux de chaque
personnage (Alain est un père qui n'a jamais grandi, Catherine s'avère un peu
psychorigide, Jean-Pierre est un faux snob...) évolue vers un regard attentionné
qui finit par nous faire aimer les personnages malgré (à cause de ?) leurs
défauts.
La comédie chatoie souvent le
drame (pathétique de certains protagonistes) mais l'esprit reste donc bon
enfant. Tellement proches est la
manifestation d'un cinéma français sensible aux petits détails,
particulièrement bien écrit en ce qui concerne les dialogues et les
personnages. Le côté conventionnel s'illustre par des idées bien pensantes: la
réunion de la famille décomposée, la critique du racisme à travers le personnage
du médecin noir, le personnage de l' "adulescent" qui va devenir père
en quittant l'enfance...
Radioscopie de la France des années 2000. Tellement proches met en scène les différentes classes sociales de
la société française du début du millénaire: face à la famille de l'avocat, qui
flirte avec la bourgeoisie et qui met leur enfant dans une école privée (juive
parce qu'elle a de bons résultats au baccalauréat !), Alain, le fils de
coiffeur, est moniteur à l'auto école et sa femme travaille dans une épicerie. Bruno,
le médecin noir, illustre une ascension sociale qui doit lutter contre les
préjugés. La caméra bien-pensante des réalisateurs nous présente donc une
France de la diversité, de la mixité où les différentes classes sociales cohabiteraient.
Inscrit dans un décor
parisien, Tellement proches nous donne
à voir un reflet de notre quotidien. Les décors sont ceux communs des
appartements de la capitale, de la banlieue, de l'autoroute et des supermarchés.
Quant aux personnages, on a tous, un jour ou l'autre, rencontré leurs
équivalents dans la vie. Le film se clôt sur la scène d'un théâtre, où Lucien, le
fils d'Alain et de Catherine, devenu comédien, remercie toute sa famille, qui
se trouve dans la salle, pour l'avoir inspiré pour son one man show. Dans ce
final maladroit qui trahit le caractère autobiographique du film (péché mignon
du cinéma français), on comprend que la justesse du film tient à son sentiment
de vécu.
Si le film nous parle tant,
c'est bien parce que les personnages sont "tellement proches" de
nous. Le cinéma de ce type révèle les dysfonctionnements de la société afin de
nous montrer que nous partageons tous la même expérience (cf. la série Bref ou les chansons de Bénabar): la
finalité dernière illustre un désir de normalité, de conformisme.
02.12.12.