Issu du Dogme (Italian For Beginners est tourné selon
les principes du mouvement créé par Thomas Vinterberg et Lars Van Triers), la
danoise Lone Scherfig réalise en Angleterre Une
Éducation, un récit d'apprentissage d'une jeune britannique dans les années
60.
Brillante élève, Jenny, 16
ans, se prépare pour intégrer Oxford mais sa rencontre avec un homme deux fois
plus âgé qu'elle va tout remettre en cause. En effet, le riche et élégant David
lui propose un vie séduisante: night-clubs, virée à la campagne en voiture,
voyage à Paris. Mais, le rêve se révèle une illusion, David n'étant pas
forcément celui qu'il prétend être...
Comme son titre l'indique, Une Éducation est avant tout un récit
d'apprentissage, celui d'une enfant encore candide qui découvre trop tôt la vie
d'adulte (indépendance, relations sexuelles) et qui va assumer ses
responsabilités (ses études et donc son avenir sont compromis) suite à une dure
prise de conscience: il ne faut pas vouloir tout tout de suite et se méfier de
la vie facile et des apparences. Au bout du conte, la perte de l'innocence,
comme dans tout récit d'apprentissage, se fait autant constructeur que
destructeur.
On l'aura compris, le film se
conclut par la condamnation d'une jeunesse qui brûle les étapes, fin pour le
moins moralisatrice voire réactionnaire. Néanmoins, il ne faut pas occulter
toute le critique de la monotonie de l'Angleterre provinciale du début des
années 60 envahie par la rigueur et l'ennui. Deux instances sociales (la
famille, l'école) viennent incarner cette étroitesse d'esprit et cette fermeté qui,
malgré une attention portée à la jeunesse, bride son imagination et son désir
de vivre. Jenny trouve ainsi dans David l'occasion de matérialiser ces rêves, à
savoir l'amour de la musique (concerts de jazz ou de classique) et de la France
(voyage romantique à Paris). « This whole stupid stupid is bored ! There's no
light, or color, or fun » s'exclame Jenny: cette volonté de fuir ce pays
moribond explique la fuite en avant du personnage principal qui fait écho aux
rêveries des protagonistes des films du free cinema des années 60 (Un Dimanche pas comme les autres et Billy le menteur de John Schlesinger, La solitude du coureur de fond de Tony
Richardson).
Avec sa conclusion
moralisatrice, engoncée dans une soigneuse reconstitution, Une Éducation apparaît comme conventionnel. Néanmoins, la subtilité
des dialogues, des personnages ainsi que de l'interprétation (révélation de
l'actrice Carey Mulligan) contribue à apporter de la vraisemblance et de la
sensibilité à ce portrait tout de même contrasté de l'Angleterre du tout début
des années 60, conservatrice mais en attente des "swinging sixties".
12.04.13.