Un film d'origine théâtrale. Adaptation d'une pièce de théâtre
écrite par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, Cuisine et Dépendances est le film qui va lancer le duo
d'auteurs/comédiens qui collaboreront par la suite avec Cédric Klapisch (Un Air de Famille) et Alain Resnais (Smoking/No Smoking; On connait la chanson).
Une séquence inaugurale, avec des mouvements de caméra, tournée dans le BHV
ainsi qu'une mise en scène mobile parviennent dans une certaine mesure à aérer
le huis-clos théâtral. En effet, le film ne se déroule pratiquement que dans la
cuisine d'un appartement parisien où un couple de bourgeois a invité des amis de
jeunesse à diner pour des retrouvailles[1].
Du théâtre, on retrouve donc une unité de temps (une soirée) et de lieu (le
décor de la cuisine, reconstitué en studio) ainsi qu'un nombre limité de
protagonistes (les convives, les hôtes, le frère de la maîtresse de maison et
un ami de la famille).
Une satire de la bourgeoisie parisienne. Cuisine et Dépendances repose donc essentiellement sur ses
comédiens et sur ses dialogues savoureux. Ces deux éléments contribuent à
donner de la vie et de la justesse à la peinture de la société bourgeoise et
parisienne de nos jours. La maîtresse de maison est une mère au foyer
dépressive; son mari s'est lui enfermé dans une routine; l'ami de la famille
est un bougon asociale alors que le frère est un éternel trentenaire
irresponsable, amoureux de "pépées" et de poker. Face à eux, les
invités symbolisent la réussite: le mari, absent de l'écran, brille néanmoins
de tout son éclat bien que sa femme soit souvent par conséquent délaissée.
Jaoui et Bacri excellent dans la description des travers de leurs pairs: l'égoïsme
de chacun, la difficulté à écouter les autres, la patience fragile et les
illusions perdues. Ce sont toutes ces amertumes qui mèneront le sympathique
diner en ville à "dégénérer". Car derrière la comédie, on décèle la
satire et la critique. Derrière le rire perce l'amertume.
11.07.13.
[1]
Le diner en ville devient un cliché du cinéma français: Le Diner de cons (1999) de Jacques Weber, L'invité (2007) de Laurent Boutnik, Le Prénom (2012) d'Alexandre de la Patellière...