Le
Syndicat du Crime est le premier
film majeur de John Woo. Succès considérable au box-office asiatique, le film
révéla également le cinéaste sur la scène internationale. Il est vrai que ce
film d’action hongkongais apparaît comme un sommet du genre.
Le Syndicat du crime conte l’histoire
tragique de deux frères ayant pris des trajectoires différentes. Ho, l’aîné,
est un truand, embarqué avec son ami Mark dans un gang de faux-monnayeurs.
Sung, le cadet, est un jeune flic à l’avenir prometteur. Lorsque leurs deux
chemins se croisent, le drame commence : Ho décide de « se
ranger » mais Sung ne peut obtenir de promotion en raison de son frangin.
Cette histoire de frangins séparés par la loi n’est pas nouvelle, bien sûr :
elle fonde le film de gangsters américains des années 30 et constitue, par
exemple, le cœur des Anges aux figures sales (1938) de Michael
Curtiz.[1] Dans le cinéma
honkongais, on devine que le film de John Woo, qui pose furtivement la question
de l’infiltration de la mafia dans la police, influencera directement la
trilogie des Infernal Affairs (2002-2003)
d’Andrew Lau et Alan Mak.
Sur la base de ce scénario très classique
(et donc très efficace), et renonçant à tout motif qui le rattache au cinéma
asiatique et à tout folklore, John Woo développe une mise en scène qui assume
pleinement le lyrisme des situations, accentué par une musique aux relents
morriconiens période années 80. Les scènes d’actions, anthologiques, se
soucient peu de la réalité et s’apparentent à des danses macabres
ultrachorégraphiées. Les scènes de règlement de comptes bénéficient de ralentis
impressionnants et de mouvements de caméras gracieux. L’esthétisation de la
violence, ce culte de l’amitié virile font penser à Peckinpah.[2] La comparaison
avec le cinéaste américain est renforcée par un aspect dramatique commun:
les protagonistes, derniers chevaliers dans une société moderne qui les dégoute,
vont tirer leur révérence dans une ultime explosion de violence.
A la fois lyrique et spectaculaire, Le
Syndicat du Crime a bien sûr un peu vieilli. Si le film fleure bon les 80s,
il n’en demeure pas moins un classique du film d’action hongkais. Deux
suites furent produites: Le Syndicat du Crime II (1987), encore
réalisé par John Woo, et Le Syndicat du Crime III (1989), réalisé
par Tsui Hark.
03.07.12.
[1] John Woo s’inspire également très
largement d’un film de 1967, Story of a
Discharged Prisoner de Patrick Lung-Kong, qui partage avec Le Syndicat du Crime un même titre
original chinois.
[2] John Woo revendique une autre
influence, celle de Martin Scorsese dont l’utilisation dramatique d’un ralenti
dans Mean Streets semble avoir
durablement marqué Woo, au point qu’il pastiche la scène dans Le Syndicat du Crime.