Richard Berry, vedette du
polar dans les années 80 (Le Grand
Pardon, La Balance, Spécial Police), se lance dans la mise en scène au
début des années 2000. Après La boite
noire (2005), thriller psychologique avec José Garcia, Richard Berry signe L'Immortel, un polar sur la mafia
marseillaise, produit par EuropaCorp, la société de production de Luc Besson.
Jacky le mat. L' "immortel", c'est Charly Matteï, incarné
par Jean Reno, gangster à la retraite inspiré par Jacky le mat, truand qui
régna sur la cité phocéenne dans les années 1970. Adapté d'un roman de
Franz-Olivier Giesbert, le film préfère transposer l'action à l'époque
contemporaine.[1] Laissé
pour mort dans un parking avec 22 balles dans le corps, l'ancien hors-la-loi
refuse de mourir et met en place sa revanche contre le parrain de la ville qui
fut jadis un ami d'enfance. Les thématiques de L'Immortel sont très convenues: vengeance et trahison, incapacité
du criminel à tourner la page de son passé, la violence engendre la violence...
Un Parrain à Marseille. Richard Berry, pour la représentation de la
mafia, semble s'inspirer de Francis Ford Coppola: le méchant parrain (Kad Merad
en gangster corse !), reçoit ses visiteurs dans la pénombre de son bureau, les
sanglants règlements de compte sont montés en parallèle avec une séquence de
cérémonie familiale (le mariage du fils du patron) et l'opéra (Puccini et
Verdi) illustrent musicalement la tragédie sanglante de l'histoire. Jean-Pierre
Darroussin, en avocat de la famille, fait office de Tom Hagen, en ayant le
crâne tout aussi dégarni que Robert Duvall. D'autres poncifs complètent le
scénario balisé[2] de L'Immortel: le parrain, maniaque de la
propreté, répugne par sa froide violence, son appartement opulent et ses
collusions avec un monde politique corrompu; l'immortel bénéficie de l'aide
d'une flic alcoolique, bien décidée à coffrer celui qui est responsable de la
mort de son mari.
Un exemple de production d'EuropaCorp. La mise en scène de Richard
Berry illustre les traits caractéristiques des productions de la société de Luc
Besson[3]:
Pour souligner l'émotion, le ton s'avère lyrique (musique d'opéra, amples et
fluides mouvements de caméra) et les scènes d'action (poursuite en voiture,
fusillades) sont "boostées" par un montage énergique et une bonne
dose de violence. Le film lorgne parfois vers la publicité: dans une séquence
grotesque, la caméra tourne autour de Jean Reno, lequel discute avec son chien
au bord de la mer, accompagné d'un plat de pates, le tout sur air de
Pavarotti...
Un scénario convenu, de
l'action et de belles vues de Marseille sont les recettes de L'Immortel, une production EuropaCorp
qui apparaît comme une série B en dépit de l'importance de son budget (17 millions
d'euros). Le divertissement, à défaut de l'originalité, est tout de même au
rendez-vous.
08.07.14.
[1]
D'autres polars français préfèrent faire le pari de la reconstitution: Sans haine ni violence (2007) de
Jean-Paul Rouve sur l'affaire Spaggiari, le dyptique de Jean-François Richet
sur Mesrine (2008), Les Lyonnais
(2011) d'Olivier Marchal sur le gang des Lyonnais ou encore bientôt La French (2014) de Cédric Jimenez sur
l'assassinat du juge Pierre Michel
[2]
Le scénario est signé par le tandem Alexandre de la Patellière (fils de Denys)
et Matthieu Delaporte qui avait écrit les scénarii des Parrains (2005) de Frédéric Forestier, Renaissance (2006) de Christian Volckman et surtout Le Prénom (2012) qu'ils ont eux même
réalisé.
[3]
Notons cependant que le film est produit par Pierre-Ange Le Pogam.