Esquissé par David W. Griffith, Raoul Walsh, Roy Sheldon, Thomas Ince, George Irving ou encore Eric Von Stroheim, le film de gangsters naît vraiment en 1927 avec Les Nuits de Chicago de Josef Von Sternberg. Le film connut un succès phénoménal à sa sortie, le public ayant été attiré par la violence sèche et inédite des brutes épaisses montrées à l’écran. Dans le film de Sternberg, tous les ingrédients principaux du genre sont déjà réunis et ils ne cesseront d’être ensuite repris par d’autres metteurs en scène.
Les Nuits de Chicago est sûrement le premier film de gangsters moderne mais c’est avant tout un film muet, avec une construction dramatique complexe (un triangle amoureux), une situation mélodramatique voire tragique (un amour impossible), des thématiques simples et universelles (l’amitié, l’honneur).
D’ailleurs, le personnage principal n’est même pas le gangster : il s’agit d’un avocat déchu qui va être mis sous la protection d’un gangster du nom de Bull Weed avant de devenir le cerveau de la bande. La petite amie du truand en tombe amoureuse. Lorsque Weed est emprisonné et que la tentative d’évasion programmée par l’avocat échoue, il se sent trahi. S’évadant par ses propres moyens, il cherche alors à se venger de son ancien ami.
Moins qu’une peinture précise du milieu du gangstérisme, ce qui importe dans le film, c’est de savoir si Weed se réconciliera avec son complice. Son sacrifice final après avoir reconnu son erreur transforme d’ailleurs le personnage ambigu en un véritable héro. Le gangster est donc humanisé. Il en de même pour sa petite amie Feathers qui, contrairement aux personnages féminins des films du genre à venir, est un personnage sensible et non un des « gadgets » du gangster, au même niveau que sa voiture, sa villa ou ses armes.
En effet, le genre du film n’est pas complètement défini comme en témoigne l’une des premières scènes : celle dans le bar qui s’apparente davantage à un autre genre, encore que naissant, le western. En fait, la bagarre qui va éclater est digne d’une bagarre de saloon.
Les éléments fondamentaux du film de gangsters sont déjà dans le film de Sternberg: l’ascension de l’homme dans l’empire du crime organisé, les règlements de comptes entre bandes, le hold-up de la banque, le vol de bijouterie, l’évasion programmée d’un détenu. Feathers incarne quant à elle le personnage de la « vamp », à l’érotisme subtil.
Cependant, le personnage de Weed apparait autant comme un brigand que comme un gangster. On ne comprend pas quelles sont ses combines et aucune référence à la prohibition n’est faite. La peinture de l’« underworld » du titre original n’est donc pas très réaliste.
D’ailleurs, le personnage principal n’est même pas le gangster : il s’agit d’un avocat déchu qui va être mis sous la protection d’un gangster du nom de Bull Weed avant de devenir le cerveau de la bande. La petite amie du truand en tombe amoureuse. Lorsque Weed est emprisonné et que la tentative d’évasion programmée par l’avocat échoue, il se sent trahi. S’évadant par ses propres moyens, il cherche alors à se venger de son ancien ami.
Moins qu’une peinture précise du milieu du gangstérisme, ce qui importe dans le film, c’est de savoir si Weed se réconciliera avec son complice. Son sacrifice final après avoir reconnu son erreur transforme d’ailleurs le personnage ambigu en un véritable héro. Le gangster est donc humanisé. Il en de même pour sa petite amie Feathers qui, contrairement aux personnages féminins des films du genre à venir, est un personnage sensible et non un des « gadgets » du gangster, au même niveau que sa voiture, sa villa ou ses armes.
En effet, le genre du film n’est pas complètement défini comme en témoigne l’une des premières scènes : celle dans le bar qui s’apparente davantage à un autre genre, encore que naissant, le western. En fait, la bagarre qui va éclater est digne d’une bagarre de saloon.
Les éléments fondamentaux du film de gangsters sont déjà dans le film de Sternberg: l’ascension de l’homme dans l’empire du crime organisé, les règlements de comptes entre bandes, le hold-up de la banque, le vol de bijouterie, l’évasion programmée d’un détenu. Feathers incarne quant à elle le personnage de la « vamp », à l’érotisme subtil.
Cependant, le personnage de Weed apparait autant comme un brigand que comme un gangster. On ne comprend pas quelles sont ses combines et aucune référence à la prohibition n’est faite. La peinture de l’« underworld » du titre original n’est donc pas très réaliste.
L’esthétique de Sternberg, réalisateur d’origine autrichienne, est très influencée par l’expressionnisme, notamment dans les éclairages et les ombres. L’atmosphère noire est en fait plus poétique que réaliste. L’ambiance du futur film noir est déjà perceptible dans Les Nuits de Chicago. Mais ce sont surtout les rapides mouvements de caméra, frappants de modernité, qui surprennent le spectateur de nos jours, prouvant ainsi la puissance du style de Sternberg.
Le film de Sternberg a beaucoup influencé Howard Hawks qui avait participé au scénario sans être crédité, l’oscar du meilleur scénario revenant à Ben Hecht, le véritable auteur du script. Lorsqu’ils écriront tous deux le scénario de Scarface que Hawks réalisera en 1932, ils réutiliseront de nombreux éléments des Nuits de Chicago : des gangsters qui feignent d’être fleuristes, une fête grandiose avec pacotilles, un final avec le gangster retranché dans une maison assaillie par les flics et tirant sur ceux-ci avec une mitraillette Thompson. De plus, le néon « The City is Yours » est changé en « The World is Yours » et le « side-kick » des Nuits de Chicago jouant avec son chapeau est remplacé par le personnage interprété par George Raft dans Scarface qui joue avec une pièce.
En fait, Hawks n’a jamais caché son admiration pour Sternberg et pour ses Nuits de Chicago. D’ailleurs, il s’en est aussi inspiré pour son western Rio Bravo en 1959 : « J’ai volé deux choses : le dollar dans le crachoir et le nom de la fille, Feathers »[1]. En effet, il n’avait pas oublié la scène du bar des Nuits de Chicago très « westernienne ». Le film de Sternberg n’a donc pas seulement été une source d’inspiration pour des films de gangsters.
Les Nuits de Chicago est donc une date importante dans l’histoire du film de gangsters et dans le « crime movie » américain. Josef Von Sternberg avait ainsi consolidé son statut à la Paramount. Il retrouvera ses interprètes des Nuits de Chicago dans ses films suivants : Evelyn Brent, « Feathers », dans le film de guerre Le Crépuscule de la gloire (1928) et George Bancroft[2], le dur Bull Weed, dans Les Damnés de l’océan (1928). Il continuera à faire des films de gangsters : La Rafle en 1928, de nouveau avec le couple des Nuits de Chicago et L’Assommeur en 1929, seulement avec George Bancroft et qui sera son premier film parlant. Ensuite, en 1930, il fera la rencontre décisive avec Marlene Dietrich sur le tournage de L’Ange bleu qui sera le début d’une longue collaboration.
Les Nuits de Chicago ouvrait la voie aux films de gangsters avec The Racket (1928) de Lewis Milestone, Au Seuil de l’enfer (1930) d’Archie Mayo, mais surtout avec les films moteurs du genre tels que Le petit César (1931) de Mervyn Leroy, L’Ennemi public (1931) de William Wellman et Scarface (1932) d’Howard Hawks.
26.02.08.
[1] In Hawks par Hawks (1987) de Joseph Mc Bride, éditions Ramsay, page 187.
[2] George Bancroft (1882-1956) est une figure non négligeable du film de gangsters. En effet, il a aussi joué dans Blood Money (1933) de Rowland Brown, Racketeers in exile (1937) d’Erle C. Kentonet surtout des seconds rôles dans Les Anges aux figures sales (1938) de Michael Curtiz et A chaque Aube je meurs (1939) de William Keighley. Il a été nominé pour l’oscar du meilleur rôle en 1929 pour L’Assommeur de Josef Von Sternberg. Mais on se souvient surtout de lui dans son rôle du shérif chargé de la garde de la diligence dans La Chevauchée fantastique (1939) de John Ford.