jeudi 24 janvier 2013

Wall-E (2008) d'Andrew Stanton

Comme d'autres films de Pixar, Wall-E procède à une anthropomorphisation d'une construction mécanique: après les jouets (les Toy Story) et les voitures (Cars), c'est au tour d'un robot de prendre vie et d'attirer toute la sympathie du spectateur.
 
C'est pari tenu avec Wall-E, petite machine que les humains ont laissé sur terre avec la mission de nettoyer la planète. Maladroit, solitaire et curieux, le robot se voit doté d'une personnalité et d'une sensibilité particulièrement humaines. L'humanisation se poursuit lorsque le personnage tombe amoureux d'une "robote", envoyée sur terre pour vérifier si la vie humaine est de nouveau possible. L'humanisation progressive du personnage peut être vue comme la manifestation quasi déontologique de la démarche de Pixar qui consiste à donner vie à des personnages fictifs, crées en images de synthèse. L'une des scènes récurrentes du cinéma Pixar demeure en effet la scène de la "casse" où l'on s'inquiète de la possible disparition des protagonistes, pour qui la vie est fragile.
 
Wall-E est construit en deux parties. La première, muette et quasi expérimentale, est une fable écolo où l'on voit Wall-E essayer péniblement de purifier la planète détruite par les hommes. Les images post apocalyptiques d'un New York enseveli d'ordures, avec ses buildings en décomposition, renvoient aux images du 11 septembre. Mais la ville, déserte et abandonnée, fait également penser aux films de Science-fiction futuristes comme Le Monde, la Chair et le Diable (1959) de Ranald MacDougall ou encore les différentes adaptations de Je suis une Légende de Richard Matheson. Mais la peur de l'atomique a été remplacée par celle de la pollution: la planète n'est plus qu'une terre aride et sale, un désert d'immondices. Nous noterons également l'influence de Spielberg, l'allure de Wall-E ainsi que ses virées nocturnes, renvoyant à ET ou Rencontre du Troisième Type.
 
Dans la seconde partie, Wall-E part dans l'espace pour rejoindre un vaisseau spatial où se sont entassés les humains. Les hommes se reposent sur les machines, qui les portent et qui travaillent à leur place. A travers la vision de ces hommes du futur, idiots, obèses et indifférenciés, les auteurs de Wall-E se prêtent à une satire des Américains. Car cette partie de Wall-E s'apparente à une anticipation dystopique, genre critique de la SF: règne de la machine, aseptisation de la société, victoire du consumérisme et de la publicité... Les humains ont renoncé à leur identité et sont devenus asservis par la machine. L'idée s'illustre explicitement avec le capitaine du vaisseau, victime de l'autorité de son ordinateur, le "pilote automatique". On peut y voir une référence à 2001, l'Odyssée de l'Espace et HAC, l'ordinateur qui prend le contrôle.
 
En montrant la victoire dangereuse de la machine sur l'homme, la seconde partie de Wall-E semble donc contredire son propos initial qui consistait à humaniser la machine avec son personnage principal. Le film aboutit à une conclusion relativiste et manichéenne: comme chez les hommes, il y a des bons et des mauvais chez les machines. Nous noterons d'ailleurs la victoire de l'ancien sur le nouveau, celle de la bonne vieille machine obsolète sur le high tech, dans une logique conservatrice et réactionnaire. Si l'on ajoute à cette vision simpliste, des courses poursuites et de l'action un peu fatigantes, on comprendra donc que cette seconde partie de Wall-E est bien moins convaincante que la première.
 
Inégal mais original, Wall-E demeure tout de même une réussite des studios Pixar dont apprécie la beauté de l'animation et la délicatesse de la poésie.
 
08.01.13.