samedi 8 septembre 2012

Magic Mike (2012) de Steven Soderbergh


            Cette année, le prolifique Steven Soderbergh a sorti deux films et révélé deux comédiens. Le premier, Piégée, propose une énergique version féminine de Jason Bourne avec Gina Carano, une athlète d'arts martiaux. Le second, Magic Mike, s'inspire du passé de l'acteur Channing Tatum, qui était strip-teaseur dans sa jeunesse.
            Eclectique, Soderbergh avait déjà abordé des "sujets de société" aussi variés que la drogue (Traffic, 2000), le scandale des eaux empoisonnées et cancérigènes (Erin Brokovich, 1999) ou encore la prostitution de luxe (The Girlfriend Experience, 2009). Ici, le strip-tease n'est pas un sujet de comédie comme dans The Full Monty (1997, Peter Cattaneo) mais s'apparente davantage à un drame social: en suivant l'initiation d'un jeune homme au strip-tease, le spectateur découvre un monde qui lui est plutôt étranger et se forge peu à peu une opinion. 

            Au premier abord, le strip-tease est tout simplement un spectacle qui excite les femmes bien qu'il puisse mettre mal à l'aise les hommes. En effet, les shows paraissent souvent de mauvais goût: la mise en scène, la sur-sexualisation, les costumes grotesques (pompiers, soldats...). Mais l'univers du strip-tease semble libre: le sexe y est normalisé, omniprésent certes, mais sans complexe.
            L'envers du décors, c'est que le strip-tease est le fruit d'un travail. En effet, il s'agit d'un business sérieux et rentable, organisé par des professionnels qui savent comment danser pour plaire aux femmes, entretenir leur désir sans pour autant leur succomber. L'une des règles déontologiques est d'ailleurs la suivante: ne jamais embrasser de cliente. 

            Le strip-tease est donc un un monde en soi avec des règles et des professionnels mais s'agit-t-il pour autant d'un secteur d’activité comme les autres ? Le revers de la médaille a  de quoi dégouter. Au monde diurne aux teintes sépia (le jaune est la couleur de l'indécision, d'un monde plus complexe) Soderbergh oppose le monde factice de la nuit, filmé avec des couleurs bleues et artificielles. Les motivations d'Adam, le jeune homme qu'initie Mike, sont ainsi superficielles: l'enrichissement, la célébrité, la vie facile. L'univers de la nuit, c'est aussi un monde interlope, de drogue et de vie dissolue.
            Magic Mike s'avère donc un film très moralisateur. Comme la boxe, le métier de strip-teaseur est une activité du prolétaire qui donne son corps parce que c’est pour lui le seul moyen de gagner de l’argent. Le danger est alors celui de l'aliénation.  C'est ce que comprend Mike qui finit par renoncer à sa vie nocturne: à la horde de femmes déchainées, il préfère la vertueuse sœur d'Adam, pale et fragile. En déclarant que ce qu'il fait ne conditionne pas ce qu'il est, Mike décrédibilise son travail.
            Vendre son corps est une chose, être quelqu'un en est une autre. Le soir, Mike fait rêver les femmes mais ne parvient pas à développer une relation sérieuse avec une fille et ne sait même plus quelles études elle fait. C'est pourquoi Mike, déjà trentenaire, envisage autre chose: il rêve d'être un entrepreneur, de monter une boite de vente de meubles. Il est temps pour Mike de se reconvertir, de construire du vrai à défaut de faire rêver à partir du faux. 

22.08.2012.