mercredi 14 septembre 2011

The Candidate / Votez McKay (1972) de Michael Richie


         Après La Descente infernale (1969), un premier film sur le monde des skieurs de compétition, Michael Richie retrouve son interprète principal Robert Redford. Votez McKay, centré sur les coulisses d’une campagne électorale sénatoriale, fait partie avec Tempête à Washington (1962) d’Otto Preminger et Que le meilleur l’emporte (1964) de Franklin Schaffner des meilleurs films sur les arcanes du pouvoir politique américain. Plus de quarante ans après sa sortie, Votez McKay reste en effet d’une actualité brulante.

         Votez McKay frappe tout d’abord pour le sentiment de réalité qu’il donne. Le scénario, écrit par Jeremy Larner [1], s’inspire des sénatoriales californiennes de 1970 qui ont opposé le républicain George Murphy à John V. Tunney, jeune candidat démocrate : ainsi, face au candidat républicain, « éléphant » aguerri, Bill McKay se présente comme un candidat « neuf » bien qu’il soit issu d’une famille d’hommes politiques. Par son charisme et sa beauté, ce démocrate progressiste, nous fait penser à Kennedy (John Fitzgerald comme Robert). Le choix de casting de Robert Redford n’est d’ailleurs pas anodin, le comédien jouant sur son image d’acteur populaire : plus tard engagé dans l’environnement, il aurait très bien pu se lancer dans la politique.
         Son personnage, déterminé et sincère, est néanmoins ambigu. McKay, avocat intègre et soucieux du bien commun, ne s’est pas lancé spontanément dans les élections : c’est un consultant politique qui est venu l’aborder. Joueur, il se présente car il n’a rien à perdre et tout à gagner. Conciliant l’intérêt personnel avec l’intérêt général, McKay va se permettre de faire preuve de fougue et de naturel lors de sa campagne.
         Néanmoins, la pression de son équipe (l’ère des spin doctors commence alors) ainsi que l’influence des publicitaires, des soutiens financiers ou des instituts de sondage vont détourner McKay de ses convictions premières. Se déplaçant de meeting en meeting, il devient consciemment un véritable automate, répétant sans cesse ses slogans dont le sens disparait peu à peu(« there must be a better way !»). Lorsqu’il est élu, McKay a gagné son pari mais semble avant tout effrayé par les conséquences de ce jeu. C’est sur sa triste interrogation de « What do we do now ? » que ce clôt avec noirceur le film. La conquête du pouvoir n’est pas tout, il faut savoir l’exercer.

         Votez McKay s’avère donc un film passionnant. D’un côté, on est captivé par le style documentaire qui révèle les secrets d’une campagne politique. De l’autre, on est terrifié par le propos engagé du film qui dénonce avec brio la fin du débat politique par la vente d’un candidat comme un bien de consommation. Une fois de plus, le cinéma américain des années 70, traumatisé par l’affaire du Watergate, prouve encore sa méfiance envers la politique et tente d’éveiller le regard critique du public.


[1] Jeremy Larner, journaliste, a rédigé les discours du sénateur Eugene J. McCarthy lors de sa campagne pour les primaires démocrates de 1968. Larner a gagné un oscar pour son scénario.