samedi 8 octobre 2011

Let’s make Love / Le Milliardaire (1960) de George Cukor


         Après The Actress (1953), Une étoile est née (1954) et Les Girls (1957), George Cukor réalise un nouveau film consacré au monde du spectacle. Comédie sentimentale, Le Milliardaire flirte également avec le backstage musical. Servie par de bons comédiens et par une mise en scène élégante, cette fable sur la richesse doublée d’un réjouissant marivaudage s’avère assez sympathique.


         Le film débute par la présentation des sept générations de Clément qui ont construit la fortune colossale de la famille. Jean-Marc Clément (Yves Montand), l’héritier milliardaire, n’est pas marié. Lorsque son état-major lui apprend qu'une revue satirique le prend comme sujet de moquerie, il décide de se rendre sur place afin de juger par lui-même. C’est là qu’il rencontre Amanda Dell (Marilyn Monroe), la danseuse vedette de la troupe. Clément se fait alors embaucher comme acteur pour mieux séduire celle qu’il aime.
         Entretenant un magistral quiproquo, Le Milliardaire adopte un ton résolument comique. Cukor joue sur les ficelles de la différence sociale entre l’élégant homme d’affaire frenchy et la jolie danseuse, fille d’origine modeste. Comme dans de nombreux films de Cukor (Sylvia Scarlett, Une étoile est née ou encore My Fair Lady), on assiste à la métamorphose d’un personnage. Habituellement spécialisé dans la peinture de portraits féminins, Cukor étudie pour une fois le sexe opposé.
         Jean-Marc Clément va ainsi se défaire de son identité de milliardaire et gagner en simplicité. Cette mutation se double également d’une américanisation, le français apprenant le show business à l’américaine : il prend des cours de danse avec Gene Kelly, de chant avec Bing Crosby et de théâtre avec Milton Berle ! Le film se conclura sur une note positive, Jean-Marc Clément finissant par être aimé pour ce qu’il est et non ce qu’il a : on n’est pas loin de Comment épouser un Millionnaire (1953) de Jean Negulesco (également avec Monroe).
         Le personnage de Jean-Marc Clément agace parfois mais c’est le film lui-même qui nous invite à rire de ce dernier : en effet, ce protagoniste un peu coincé du cul et aux blagues minables nous paraît souvent ridicule. Néanmoins, Cukor développe la sympathie du spectateur envers le personnage, lucide sur lui-même et sur ceux qui l’entourent.
         En plus de cette maturité, le film présente des qualités certaines : les numéros musicaux sont assez enjoués (en particulier « My heart belongs to Daddy » et « Let’s make Love ») et les seconds rôles à la hauteur (Tony Randall ou le chanteur Frankie Vaughan). Cela compense la naïveté qu’implique la forme de conte (on peut penser au Prince et la danseuse, autre film avec Monroe) et l’humour bon enfant que l’on peut rencontrer dans Le Milliardaire.


         Le Milliardaire constitue une rencontre unique d’un couple d’acteurs qui ne marche pas trop mal [1]. Il s’agit d’une comédie américaine assez classique, où l’audace voisine les conventions romantiques.

08.10.11.

[1] Yves Montand et Marilyn Monroe auraient d’ailleurs eu une liaison lors du tournage. Notons que Le Milliardaire est seul film américain de Montand. Quand à Monroe, elle retrouvera Cukor pour Something got to Give, film qui restera inachevé en raison de la mort mystérieuse de l’actrice.