mardi 9 août 2011

Submarine (2011) de Richard Ayoade


         Submarine, précédé d’une aura acquise au festival de Toronto puis de Sundance, se présente comme le film « indie » britannique du moment. Premier film de Richard Ayoade, réalisateur trentenaire issu du clip, Submarine n’échappe en effet à aucune des ficelles du cinéma indépendant dont il semble même illustrer l’arrivée à un certain classicisme thématique et formel.

         Submarine s’apparente à un teen movie : du haut de ses 15 ans, Oliver Tate se pose beaucoup de questions existentielles. Deux préoccupations majeures le démangent plus particulièrement: il rêve de coucher avec sa petite amie et espère pouvoir sauver le couple parental d’une dérive imminente. Ayoade nous « plonge » alors dans la pensée de cet adolescent drôle et timide.
         Les choix esthétiques audacieux ne nous étonnent donc pas tant ils deviennent communs de nos jours. Une voix-off donne ainsi d’emblée le ton : à la fois libre, fantasque et décalé. Le réalisateur privilégie l’onirisme, la mise en abyme ainsi qu’une grande attention portée aux détails et aux personnages. Il revendique surtout haut et fort ses maîtres.
         En effet, Aoyade éparpille référence sur référence à la pop française (Oliver possède l’album de Gainsbourg Initiales BB) et à la Nouvelle Vague : des titres sur fond noir (avec des lettres en majuscules colorées) ouvrent les chapitres alors qu’une musique à la façon de celle de Georges Delerue lorgne vers Le Mépris ; la coupe au bol de la girlfriend d’Oliver nous fait penser à celle d’Anna Karina ; le réalisateur copie le final des 400 Coups avec une course vers le rivage d’une plage ; dans la chambre d’Oliver, il y a une affiche du Samouraï et une peinture reprenant une image de Ma Nuit chez Maude ; Oliver envoie sa copine voir le Jeanne d’Arc de Bresson, film adulé par les jeunes turcs.
         Submarine se place également sous la paternité du Lauréat de Mike Nichols, autre histoire de passage d’un ado à l’âge adulte : même présence d’un aquarium dans le salon et même image d’une plongée dans la piscine ; même utilisation d’une musique folk-rock de Alex Turner (chanteur des Artic Monkeys), style Simon & Garfunkel ; un jeu similaire avec le cadre en faisant disparaitre le personnage de l’écran. Enfin, d’un point de vue littéraire, Submarine cite directement Sallinger et nous évoque tant l’univers « collège privé anglais » de Roald Dahl que l’humour de John Lennon (Oliver n’est pas sans ressembler au beatle : we all live in a Yellow Submarine).
         Cette accumulation peut ainsi nous paraître bien vaine. Nécessaire, elle contribue en fait à illustrer l’état d’esprit et le regard d’Oliver, cinéphile solitaire et attachant. Engoncé dans son caban, l’air flegmatique et blafard, Oliver semble hésiter à sortir de sa passivité et de sa rêverie. Son univers n’est en effet pas très prometteur. Submarine véhicule une vision naturaliste de la province anglaise : le père d’Oliver est aussi absent que dépressif, alors que sa fofolle de mère est attirée par un grotesque gourou. Le sommet de cette vision douce-amère réside dans la personnalité frigide de la petite amie d’Oliver qui refuse tout romantisme. Le personnage, comme le film, finira par l’accepter mais il conserve une distance qui empêche le spectateur d’adhérer pleinement à cette vision.

         Submarine ne s’avère donc ni révolutionnaire ni novateur. Néanmoins, il parvient, par son ton, à se démarquer sensiblement du conformisme ambiant du cinéma indépendant actuel. Il nous dresse en effet un portrait d’adolescent nuancé et juste.