jeudi 26 décembre 2013

At Berkeley (2013) de Frederick Wiseman



Depuis Titicut Folies (1967), son premier film, Frederick Wiseman n'a cessé de filmer aux Etats-Unis comme en France la société et ses institutions, qu'elles soient judiciaires, militaires, administratives, industrielles, policières, religieuses, culturelles, artistiques, sportives... Dans son dernier film, le documentariste américain filme le campus de l'université de Californie à Berkeley. 

Axant son film autour du débat concernant les réductions budgétaires de l'état de Californie et l'augmentation des droits d'inscription pour les étudiants, Wiseman scrute les signes d'une démocratie en crise. Le charismatique "chairman", le président de l'université, a beau garder le sourire, on comprend bien le déclin du prestige de la vieille université publique qu'est Berkeley et l'on mesure l'atteinte à l'égalité devant le droit à l'éducation. Bien qu'il n'y ait jamais eu autant d'élèves issus de milieux défavorisés scolarisés à Berkeley, un malaise social se révèle: les étudiants de couleur évoquent le racisme de leurs camarades et chacun craint devoir assumer une certaine représentation sociale en prenant la parole. A Berkeley, université historiquement liée à la contestation (les étudiants se réfèrent au free speech movement de Mario Savio dans les années 60), la colère gronde et le doute face au rêve américain s'instaure.  

Si Frederick Wiseman détient un sujet en or pour révéler une Amérique en crise, son modus operandi est plus discutable. Ayant tourné plus d'une cinquantaine d'heures de film, Wiseman n'en a gardé que quatre. Mais il faut avouer que la longueur du métrage, malgré les enjeux intéressants du films, fatigue le spectateur. Wiseman abuse d'une structure répétitive où il intercale, des plans larges de l'université entre chaque séquence de parole, comme des plans de coupe pour faire souffler le spectateur. Mais ce dernier a du mal à suivre l'enchainement continu des réunions dans des salles de conseil. Les différentes séquences (les réunions d'élèves et les réunions pédagogiques, les cours et les revendications sociales) se répètent ainsi inlassablement pour le public à qui Wiseman demande une attention constante. Si At Berkeley traduit une démarche utile et intelligente de Wseman, elle n'en est pas moins une œuvre exigeante.

 11.11.13.