dimanche 26 janvier 2014

Jimmy P., Psychothérapie d'un indien des plaines (2013) d'Arnaud Desplechin

Après Un Conte de Noël (2008), Arnaud Desplechin tourne Jimmy P., Psychothérapie d'un indien des plaines aux Etats-Unis et en langue anglaise. L'action se situe dans un hôpital militaire du Kansas en 1948 et se centre sur la relation (véridique) entre Jimmy Picard, un indien d'Amérique, vétéran de la guerre victime de vertiges, et son médecin, Georges Devereux, un psychanalyste et ethnologue français d'origine roumaine.
 
Desplechin rentre dans le quotidien d'une psychanalyse: Jimmy Picard raconte ses rêves, son enfance et ses déboires sentimentales pendant que Georges Devereux prend des notes sur son carnet. Mais un échange véritable s'installe entre les deux hommes: malgré les différences culturelles (le "sauvage" mutique et réservé face à l'occidental bavard et volubile) et physiques (la carrure du comédien Benicio Del Toro contre l'aspect malingre Mathieu Amalric), une complicité s'instaure entre ces deux rejetés de la société (l'indien dans la société américaine, l'intellectuel juif d'Europe de l'Est en Occident). Desplechin expose même l'idée intéressante que le véritable malade est peut-être le personnage exubérant de Georges Devereux, fragile physiquement et grimaçant parfois comme un hystérique.
 
Jimmy P. apparaît comme une manifestation moderne de ce bon vieux penchant de Hollywood pour la psychanalyse, laquelle résout les problèmes via la vision et les flash back (de l'enfance, des moments traumatisants...). Si la psychanalyse séduit le spectateur (même s'il est récalcitrant à la matière de Freud), c'est parce qu'elle prend la forme d'une enquête: plus le film avance, plus l'on pense se rapprocher d'une révélation, d'une résolution. Mais là le film de Desplechin échoue (ou trouble volontairement ?), c'est que l'on reste sur sa faim: finalement, on n'a pas véritablement compris les maux de Jimmy Picard et l'on n'est pas sûr de sa guérison... A cela, s'ajoute l'idée que la véritable souffrance du malade trouve son origine dans son rejet par la société occidentale, idée développée mais pas pleinement explicitée tout au long du film.
 
Comme de nombreux films de Desplechin, Jimmy P. manque de clarté dans le traitement du sujet et de ses personnages. Avouons néanmoins que l'acclimatement du réalisateur aux Etats-Unis bride les effets de style récurrents de sa mise en scène au profit d'un film plus classique et l'auteur de ses lignes s'en est réjouit...
 
07.01.14.