dimanche 26 janvier 2014

Rysopis / Signes particuliers: néant (1964) de Jerzy Skolimowski


Après avoir scénarisé un film de Wajda (Les innocents charmeurs, 1960) et de Polanski (Le couteau dans l'eau, 1962), Jerzy Skolimowski, issu de l'école de Lódz, réalise son premier long métrage, Rysopis / Signes particuliers: néant, en 1964. Le film inaugure une série de films à caractère autobiographique, mettant en scène Andrzej Leszczyc, personnage d'éternel « adulescent », double attachant du réalisateur (joué par Skolimowski lui-même dans trois films sur quatre). 

La légèreté du film de Skolimowsvki semble inspirée par le cinéma de Nouvelle Vague française. Centré sur les mésaventures d'un jeunesse qui peine à trouver sa place dans la société, Rysopis adopte un ton doux-amer: Andrzej est un étudiant qui n'a toujours pas fini ses études (ou plutôt les avait-il déjà commencées ?) et qui a fui le service militaire (ce détail fait écho au statut de déserteur de Doisnel dans Baisers volés de Truffaut; la critique se plaît souvent à comparer la série Doisnel avec les films de Skolimowski). Il s'enlise dans une relation amoureuse qui ne semble guère lui convenir, s'occupe de son chien enragé et passe la plus part de son temps à flemmarder... Andrzej Leszczyc apparaît donc comme un véritable antihéros, un looser sympathique guetté par l'anonymat, le néant (suggéré par le titre du film). 

Disposant de peu de moyens, Skolimowski dynamise constamment sa mise en scène par des trouvailles. Il multiplie ainsi les plans séquences et les expérimentations visuelles: un emploi de la caméra subjective, une discussion entre des protagonistes dont on ne voit que les ombres, un plan étrange sur le reflet des clients dans la glace d'une table de café... Skolimowski confirme son statut de cinéaste jeune mais déjà audacieux, qui n'hésite par à dresser un portrait peu positif de la Pologne: on voit dans Rysopis des paysages tristes, des accidents de tramway, des soldats qui défilent au loin comme des automates et des vieux vétérans de la guerre qui radotent leurs exploits alors que leurs blessures furent causées par la vie civile... 

Après ce début prometteur, Skolimowski développera ces thématiques (le portrait de la jeunesse et la peinture de la société polonaise des années 60) dans ses films suivants tel que Walk-over (1965, davantage autobiographique, évoquant le passé de boxer et l'amour du jazz du réalisateur) La Barrière (1966, sa réflexion la plus aboutie sur la question de la jeunesse) et Haut les mains (1967, son film le plus critique envers le régime communiste). 

15.01.14.