Premier film Jean Becker, Un Nommé La Rocca est une adaptation du roman L’excommunié de José Giovanni . L’histoire s’avère typique pour son auteur : comme dans Les Aventuriers, une amitié virile entre deux malfrats (joués par Jean-Paul Belmondo et Pierre Vaneck), est consolidée par l’attachement porté à une même femme. Le récit, tragique et fataliste, frappe de surcroit par l’authenticité de la peinture du gangstérisme. L’œuvre de Giovanni demeure largement d’inspiration autobiographique et notons à ce titre que La Rocca est corse, comme l’écrivain ex-taulard.
La première partie du film, centrée sur la vie de la pègre marseillaise, fait penser au Deuxième Souffle (également d’après Giovanni). La présence de Jean-Pierre Belmondo ainsi que le tournage dans les studios de la rue Jenner renforcent également la ressemblance avec l’œuvre de Jean-Pierre Melville.
La seconde partie, carcérale, se concentre sur une opération de déminage à laquelle Bébel et son ami on accepté de participer pour réduire leurs peines. On retiendra des séquences particulièrement prenantes en raison du sens de la réalité, physique et matérielle, qui rappelle une autre adaptation cinématographique de Giovanni, celle du Trou (1960) que Becker fils a dû terminer en raison du décès de son père Jean. La filiation esthétique s’affirme ainsi fortement.
Un Nommé La Rocca impressionne donc beaucoup par sa sincérité, sa noirceur et sa sobriété. Giovanni ne se sera pas pour autant satisfait du travail de Becker et réadaptera lui-même son roman en 1972 avec Belmondo sous le titre de la Scoumoune. Quant à Becker, il allait retrouver lui aussi Belmondo pour Echappement libre (1964) avec Jean Seberg, film léger et nouvelle vaguiste qui reforme avec gaité le couple d’A Bout de Souffle.