dimanche 29 juillet 2012

Way of the Dragon / La Fureur du dragon (1972) de Bruce Lee


Après The Big Boss (1971) et La Fureur de Vaincre (1972), La Fureur du Dragon est le troisième film de Bruce Lee en vedette. Pour l’occasion, le comédien se fait scénariste, réalisateur et producteur pour la première fois de sa brève carrière. Considéré comme un grand classique du film de kung fu, le film ne nous a pas vraiment convaincu.

Contrairement aux autres films de Bruce Lee, La Fureur du dragon adopte un ton résolument comique. Et il faut dire que ce choix représente un handicap pour le film. Bruce Lee joue un jeune hongkongais qui arrive à Rome pour aider le propriétaire d'un restaurant chinois assailli par la mafia. Le personnage de Bruce Lee est un idiot fini : il gargouille du ventre, demande constamment où sont les toilettes et ne pense qu’à manger. Ce paysan ne comprend rien aux mœurs locales et est sensé susciter l’hilarité à ses dépends.
Le film s’attarde dans le registre comique et retarde malicieusement  l’arrivée de l’action. Dans sa seconde moitié, La Fureur du Dragon accumule les séquences de bagarres. La prédominance de l’action et la sottise sans appel du scénario[1] donnent au spectateur un sentiment d’abrutissement. La récurrence des mêmes décors kitsch (le bureau du méchant, l’auberge sordide où bosse Bruce Lee et l’appartement de sa copine) n’est même pas contrebalancée par les plans tournés en décors naturels, peu nombreux et privilégiant une Rome de carte postale.
Si le film s’amuse de l’inadaptation de son héros, incapable de saisir l’attrait des jardins romains ou les comportements des italiens, La Fureur du dragon véhicule surtout un refus de l’Occident. Le grand méchant, américain, est un patron capitaliste caricatural, lui-même affublé d’un sbire chinetoque jouant la grande folle. Les autres américains sont soit les hommes de main du méchant, gros bras sans cervelle[2], soit des touristes naïfs. A la vilenie des gangsters répond la pureté du personnage principal, corollaire de sa simplification et comparable à celle d’un enfant. Le film se clôt par une citation du héros prônant la loi du fort. Face à un Occident cupide et décadent, la Chine a trouvé le prophète de son avènement futur : Bruce Lee !
Restent alors les scènes action, plutôt spectaculaires (les ralentis ainsi que le physique et le talent de Bruce Lee y contribuent) mais assez « assommantes ». Le final confronte Bruce Lee à Chuck Norris dans un décor bidon de Colisée et- s’achève bien évidemment par la victoire de l’asiatique. Dans cette séquence (entre autres), le film subit l’influence du western spaghetti : gros plans sur les yeux à la façon de Sergio Leone et plagiat de la musique d’Il était une fois dans l’Ouest (guitare dissonante et chœurs de femmes) sont de rigueur pour filmer le personnage de Chuck Norris. 


Oscillant entre un humour nigaud et une action débile, La Fureur du dragon de Bruce Lee relève clairement du cinéma bis. Mais, comme souvent, si le divertissement est bête, il n’est pas sans charme. On préfèrerait voir Opération Dragon, destiné au marché américain et que l’on dit délesté du comique bas de gamme.



06.07.12.




[1] A la fin, l’oncle de la copine de Bruce Lee, le cuisinier du restaurant, se retourne contre le dieu du kung fu car il préfère que son restaurant ferme : il pourra ainsi obtenir une prime de licenciement ! A ce retournement de situation, le spectateur ne sait s’il faut rire ou pleurer.

[2] Pour vaincre Bruce Lee, le méchant fait appel à deux experts du kung fu : si le premier, joué par Chuck Norris, est un américain, le second, sans surprise, est un japonais, représentant d’une nation ennemie séculaire de la Chine.