jeudi 12 juillet 2012

Yīngxióng běnsè / Le Syndicat du Crime (1986) de John Woo

Le Syndicat du Crime est le premier film majeur de John Woo. Succès considérable au box-office asiatique, le film révéla également le cinéaste sur la scène internationale. Il est vrai que ce film d’action hongkongais apparaît comme un sommet du genre.

Le Syndicat du crime conte l’histoire tragique de deux frères ayant pris des trajectoires différentes. Ho, l’aîné, est un truand, embarqué avec son ami Mark dans un gang de faux-monnayeurs. Sung, le cadet, est un jeune flic à l’avenir prometteur. Lorsque leurs deux chemins se croisent, le drame commence : Ho décide de « se ranger » mais Sung ne peut obtenir de promotion en raison de son frangin. Cette histoire de frangins séparés par la loi n’est pas nouvelle, bien sûr : elle fonde le film de gangsters américains des années 30 et constitue, par exemple, le cœur des Anges aux figures sales (1938) de Michael Curtiz.[1] Dans le cinéma honkongais, on devine que le film de John Woo, qui pose furtivement la question de l’infiltration de la mafia dans la police, influencera directement la trilogie des Infernal Affairs (2002-2003) d’Andrew Lau et Alan Mak.
Sur la base de ce scénario très classique (et donc très efficace), et renonçant à tout motif qui le rattache au cinéma asiatique et à tout folklore, John Woo développe une mise en scène qui assume pleinement le lyrisme des situations, accentué par une musique aux relents morriconiens période années 80. Les scènes d’actions, anthologiques, se soucient peu de la réalité et s’apparentent à des danses macabres ultrachorégraphiées. Les scènes de règlement de comptes bénéficient de ralentis impressionnants et de mouvements de caméras gracieux. L’esthétisation de la violence, ce culte de l’amitié virile font penser à Peckinpah.[2] La comparaison avec le cinéaste américain est renforcée par un aspect dramatique commun: les protagonistes, derniers chevaliers dans une société moderne qui les dégoute, vont tirer leur révérence dans une ultime explosion de violence.

A la fois lyrique et spectaculaire, Le Syndicat du Crime a bien sûr un peu vieilli. Si le film fleure bon les 80s, il n’en demeure pas moins un classique du film d’action hongkais. Deux suites furent produites: Le Syndicat du Crime II (1987), encore réalisé par John Woo, et Le Syndicat du Crime III (1989), réalisé par Tsui Hark.

03.07.12.





[1] John Woo s’inspire également très largement d’un film de 1967, Story of a Discharged Prisoner de Patrick Lung-Kong, qui partage avec Le Syndicat du Crime un même titre original chinois.


[2] John Woo revendique une autre influence, celle de Martin Scorsese dont l’utilisation dramatique d’un ralenti dans Mean Streets semble avoir durablement marqué Woo, au point qu’il pastiche la scène dans Le Syndicat du Crime.