jeudi 16 août 2012

From Hell (2001) des Hughes Brothers


            Après (entre autres) les nombreuses versions de The Lodger et le téléfilm en deux parties de David Wickes (1988, avec Michael Caine), From Hell est un énième film sur Jack l'éventreur, prouvant la pérennité du mythe du serial killer de White Chapel. Qu'apporte alors le film des frères Hughes ?



            Au premier abord, la représentation du Londres gothique de la fin du XIXème semble épuisée. L'imagerie a des airs de déjà-vu: Whitechapel et ses quartiers malfamés, les nuits embrumées et les fiacres inquiétants, les arbres décharnés et le cri des corbeaux. Quand une prostituée racole le soir dans une ruelle sombre, le spectateur n'est plus surpris par l'effusion de sang qui va suivre...
            Cependant, les frères Hughes parviennent à renouveler l'histoire. La nouveauté réside tout d'abord dans l'inscription de Jack l'éventreur dans son époque: dans le Londres de From Hell, on aperçoit Joseph Merrick, le fameux "elephant man", alors qu'un personnage possède un phonographe. Le film se lance dans une douteuse révélation sur l'identité du tueur: il s'agit d'un médecin de la famille royale affiliée à la franc maçonnerie; illuminé, il tue selon les ordres qu'il recevrait du "Grand Architecte".

            En plus de l'historicité, de l'authenticité du récit, les frères Hughes veulent rendre le mythe plus actuel. Malsain, l'éventreur est l'un des premiers serial killers de l'histoire du crime et déclare: "un jour, avec le recul, les hommes diront que j'ai donné naissance au XXème siècle". Des personnages de marginaux viennent attirer le jeune spectateur contemporain:  une des prostituées est lesbienne alors que l'inspecteur qui traque l'éventreur, campé par Johnny Depp, fume de l'opium. Ce personnage de policier, fin limier et expert en déduction, apparaît comme un cousin de Sherlock Holmes. Notons que la récente re-visitation par Guy Ritchie du héros crée par Conan Doyle insiste également sur l'aspect drogué du personnage.
            Esthétiquement, le visuel est trouve un second souffle, le film s'inspirant d'un graphic novel signé par Alan Moore[1]: des plans très storyboardés et une violence trash, avec sang bien rouge. A cela, s'ajoute également l'influence du clip de rap (montage haché, image granuleuse, gros plans), dans lequel les frères Hughes ont commencé, pour les scènes oniriques lors des "trips" de l'inspecteur.


            From Hell convainc en rajeunissant le mythe de Jack l'éventreur avec son côté BD. Surtout, il bénéficie d'un atout de taille: il parvient à faire peur.

01.08.2012.








[1] Alan Moore, britannique, est l'auteur de comics tels que Watchmen, La Ligue des gentlemen extraordinaires ou encore V pour Vendetta, tous adaptés au cinéma.